Post-Covid: Post-normal ou pré-normal ?

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Après la période d’isolement imposée par la pandémie du Coronavirus, les gouvernements du monde entier, et d’Europe en particulier, se sont concentrés sur le renouveau et la protection d’économies nationales aux abois. Le « Recovery Package » difficilement accouché par le Conseil Européen, et adopté récemment aux forceps, est l’exemple le plus représentatif de ce mouvement de sauvetage.

Il occulte malheureusement une mouvance généralisée et déjà discrète, dangereuse pour l’environnement et les citoyens. Détaillée du point de vue des villes portuaires sur le réseau PortCityFutures, l’idée est de démontrer que les politiques actuelles de relance économique ont développé un effet pervers: l’affaiblissement et/ou l’ignorance des règles environnementales acquises durant les dernière décennies. Les règles relatives aux études d’impact ou aux régimes de déclarations ont par exemple été simplifiées, de manière à ce que les projets, notamment industriels, soient plus facilement et rapidement approuvés.

Étonnamment, la simplification des procédures d’autorisation est passée par la réduction voire la suppression des étapes relatives à la participation du public et à l’évaluation environnementale. Les enquêtes publiques ou les consultations préalables passent ainsi à la trappe sur certains projets, le gouvernement ayant compris tout le poids donnée aux citoyens dans ces démarches. Ce mouvement est d’autant plus troublant que le principe de non-régression intégré dans le bloc de constitutionnalité et régulièrement confirmé par les juges semble ici parfaitement ignoré.

L’extension de l’usine Lubrizol, récemment devenue célèbre (Septembre 2019), via une zone de stockage acceptée sans évaluation environnementale après une modification par décret en 2018 de la nomenclature des industries classées démontre ce mouvement. Certaines installations classées Seveso ont donc été retirées d’une nomenclature stricte dans laquelle une autorité environnementale indépendante intervenait pour évaluer l’impact de leurs extensions ou installations. Le préfet, autorité de l’exécutif, est devenu compétent pour décider, au cas par cas, si le projet nécessite ou non la mise en place d’une telle procédure.

Loin d’être un exemple isolé de marche arrière, cet exemple, via la visibilité reçue, illustre une tendance que la pandémie du Covid et son impact économique ont normalisé. Plutôt que d’un retour à la normale, certaines règles protégeant la nature, et donc indirectement les citoyens, sont revenues à un état non pas antérieur au Covid, mais antérieur à une situation dans laquelle la protection environnementale s’améliorait. La priorité donnée au redémarrage économique écarte, pour des raisons de rapidité et d’efficacité, les études environnementales et la participation citoyenne. Ce privilège donné au bénéfice économique à court terme est en opposition totale avec son impact durable sur la santé et la sécurité des habitants vivant aux alentours d’installations industrielles. Crise sanitaire et relance économique ne semblent donc pas rimer avec développement durable et inclusion du public.

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Image de Daniel Briot, disponible sur Wikimedia et Flickr.

Pour plus d’informations sur le cas particulier de Lubrizol et le processus menant à une diminution des règles d’évaluations et de protection, je vous invite à consulter les articles de Actu-environnement sur le sujet.

 

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Stephan Hauser

Stephan Hauser

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